Les films d’animation camerounais sont de plus en plus populaires (Disons, qu’ils sont de plus en plus présents dans le paysage audiovisuel Camerounais) grâce à la qualité grandissante de leur animation et à la pertinence des thèmes sujets abordés. Ces dernières années nous avons eu: Minga et la cuillère cassée de Claye Edou, la vie en prose de Mboumi Cidic, la grotte sacrée de Daniel Minlo, pour ne citer que ceux-là.
Evou, l’énergie cardinale est un projet porté par Waanda stoudio qui comme ses prédécesseurs, a choisi l’animation comme moyen d’expression. Mais contrairement aux autres, le projet est une série d’animation.
Portée par une histoire originale et des personnages attachants, ce projet ambitieux démontre une fois de plus que Waanda Stoudio s’est donné pour mission d’atteindre l’excellence.
Coécrite par Emery Noudjiep et Yannick Deubou, cette série est le reflet de leur vision, inspirations et défis quotidiens.
L’histoire d’Evou l’énergie cardinale
La série met en scène le jeune et valeureux Ada qui entame un long voyage pour trouver l’Evou, la magie bienfaisante seule capable de lutter contre le désastre qui menace son peuple : maladie, famine et bêtes envoutées qui ravagent tout sur leur passage. L’histoire se déroule dans un lointain passé où les hommes sont dépendants du savoir et de la magie de leurs totems.
La série donne la part belle à la représentation des contes et mythes africains. Elle traite des sujets tels que le sens du sacrifice, de l’honneur, de magie, du respect des valeurs ancestrales. Evou montre ainsi à quel point la culture camerounaise est riche et mérite d’être célébrée.
Emery Noudjiep co-scénariste du projet Evou l’énergie cardinale, a d’abord été un auteur dramatique et metteur en scène de théâtre pendant presque 10 ans. Depuis 2015, il travaille principalement dans le cinéma, il a écrit un long métrage produit au Canada, mais aussi des séries pour la Côte d’Ivoire, le Sénégal, la Centrafrique ou encore pour le Cameroun.
Yannick Deubou co-scénariste du projet Evou l’énergie cardinale, est passionné par la bande dessinée et le récit très tôt. Il fait des études en arts plastiques et en histoire de l’art à l’université de Yaoundé. Il participe à l’album collectif : “Dans l’enfer du H’rig” paru chez l’éditeur marocain Nouiga. En parallèle à son travail d’auteur, Yannick Deubou Sikoué est membre du Collectif A3, une association qui réunit des dessinateurs camerounais et organise depuis 2010 le festival Mboa BD. En 2013, il crée Waanda Stoudio, une entreprise consacrée aux Arts graphiques.
A la question de savoir d’où leur est venu l’inspiration pour Evou et comment s’est déroulée l’écriture, Yannick Deubou nous confie:
Je suis né dans les années 80 en ville, j’ai grandi avec les contes africains tels que Leuk-le-lièvre et Nzé-la-panthère, qui ont nourri mon imagination. Adaptés au cinéma, ces contes peuvent être transmis aux générations futures. Quelques séries, telles que « Kabongo le griot », « Tales of Africa : Papa Nzenu » et « Samba et Leuk-le-lièvre », reprennent le personnage du vieux sage/griot. Inspiré par cela, j’ai commencé à travailler sur le projet de la série animée « EVOU », librement inspirée de l’épopée du Mvett, qui met en scène les trois mondes de la terre des Mod, des Mebyan et des Nsissim. La série suit l’aventure du jeune Ada, qui doit faire face à des maladies inconnues, à la disparition de sa mère, à la rupture de la connexion avec les animaux totems des clans et à la horde des bêtes envoutées par le maléfique Roi singe, qui utilise l’Evou maléfique pour dominer les Trois-mondes.
Emery Noudjiep quant à lui déclare qu’il a toujours rêvé de voir des films et dessins animés évoquant nos mythes, épopées et contes, à l’écran.
Ils sont pleins de potentiels cinématographiques mais pourtant inexplorés. C’est avec beaucoup de plaisir que j’ai abordé l’écriture mais aussi avec beaucoup de responsabilité. On ne voit pas tous les jours des dessins animés épiques venant d’Afrique et il n’était pas question que je me rate au niveau de l’écriture.
Construction de l’univers et des personnages d’Evou
L’univers d’Evou et ses personnages ont été construits de deux manières. Emery Noudjiep s’est concentré sur le côté émotionnel des personnages:
L’important à mon avis est de trouver les motivations profondes des personnages. Ada par exemple ne se lance pas dans l’aventure par héroïsme. Son véritable but est de guérir son père et retrouver sa mère disparue. C’est une façon de créer un lien entre le personnage et les gens qui peuvent comprendre ses motivations et se sentir à sa place. Le travail a été ensuite de trouver les points forts et les points faibles de chacun, ce qui fait qu’ils ne réagissent pas tous de la même façon en face d’un problème. Le tout est appuyé par une back story qui même si ce n’est pas vu à l’écran, permet de créer une distinction et une cohérence à chacun des personnage
Yannick Debou quant à lui, s’est penché sur la construction de l’univers.
Nous avons d’abord commencé par structurer l’univers des « Trois-mondes », en créant des interactions tout en laissant des espaces vides pour les conflits. Concrètement, les hommes occupent les terres montagneuses, la savane et une partie du désert à l’ouest de la forêt sacrée d’Oveng. Les Mebyans ont établi leur royaume à l’ouest de la forêt sacrée, après le désert et les montagnes interdites, tandis que les terres des Nsissim se situent après la mer, au sud d’Oveng. Les hommes sont liés aux animaux par le pacte ancestral « faire-frère ».
Pour créer un personnage qui enfreint les lois, c’est le roi Fam qui a été choisi. Lors de son intronisation, il refuse le rite du « faire-frère », provoquant le retrait des Mebyans et laissant les Mod seuls face aux menaces. Le roi Singe, un Mebyan banni, voit l’opportunité d’envahir le royaume des Mod. C’est alors qu’Ada, un jeune garçon frêle mais volontaire, est choisi par le destin pour aider à sauver les Trois-mondes.
Pour créer suffisamment d’antagonisme et d’immersion, nous avons également développé des personnages riches en couleurs autour de Ada, Fam et le roi Singe.
Les enjeux de la série Evou
Une série d’animation de cette envergure pour un studio camerounais, il fallait oser.
Evou, l’énergie cardinale, est une série ambitieuse. La première saison compte 13 épisodes de 13 minutes, ce qui représente un défi de taille, même pour les studios les plus expérimentés. Cependant, nous avons travaillé sur la série « La bande à Awa » entre 2020 et 2022, une série d’animation sur la protection de l’enfant en partenariat avec l’UNICEF au Mali. En deux ans, nous avons produit plus de 200 minutes d’animation (soit 10 minutes par épisode, sur 20 épisodes). Ce fut un défi de taille, que nous avons réussi à le relever.
Evou est différent. C’est une série destinée à la télévision, pour un public international, et elle se déroule dans un univers d’épopée fantastique. Le défi, tant au niveau du scénario que de la qualité graphique, est immense. Bien que Waanda Studio soit un jeune studio d’animation, nous avons toujours pris le temps nécessaire pour développer et réaliser nos projets. Evou annonce une production longue et ambitieuse, et nous sommes prêts à relever ce défi, Yannick Deubou se veut confiant à ce propos.
La première écriture de la saison 1 est désormais terminée, avec une intrigue principale solidement établie et des arcs de personnages bien définis pour cette première saison. Cependant, il est prévu de revenir sur l’ensemble lors d’une seconde phase d’écriture, qui sera réalisée en entame de production. Toute l’équipe était extrêmement contente d’apprendre que la série avait été sélectionnée pour le Dakar Série, et nous sommes fiers de voir Emery représenter notre projet lors de la résidence d’écriture. Parmi 120 candidatures, notre série a été choisie, ce qui est d’autant plus gratifiant étant donné qu’elle est la seule série d’animation retenue. Cela nous offre l’opportunité de nous confronter aux autres projets et d’évaluer la qualité de notre travail.
Actuellement, nous sommes en pleine production du pilote de la série, avec un teaser prévu pour une sortie d’ici décembre 2023. Nous avons également consacré du temps au développement des personnages principaux et secondaires, ainsi qu’à la création des décors. De plus, nous avons élaboré une bible littéraire et graphique, qui servira de référence pour l’ensemble du projet.
Evou bientôt sur nos écrans ?
Yannick Deubou est confiant, mais réaliste.
Certainement pas demain matin ! Selon les plans établis, nous avons fixé une période de deux ans pour la réalisation de la première saison. Cependant, pour concrétiser ce projet ambitieux, il est essentiel de trouver un ou plusieurs coproducteurs ainsi qu’un diffuseur qui souhaitent investir dans la série.
Depuis février 2023, nous avons entrepris des démarches pour rechercher des financements. Bien que nous n’ayons pas encore d’engagements concrets à ce stade, nous avons reçu des signaux positifs qui laissent présager des résultats prometteurs. La qualité du projet et son public cible suscitent un vif intérêt, ce qui renforce notre confiance dans notre capacité à sécuriser les fonds nécessaires.
Il est important de souligner que la recherche de financements pour une série télévisée est un processus complexe qui demande du temps et de la persévérance. Nous sommes conscients des défis auxquels nous sommes confrontés, mais nous sommes déterminés à faire de notre mieux pour rassembler les ressources nécessaires afin de donner vie à cette série passionnante
En attendant cette série d’animation qui promet d’être palpitante, restons au fait des actualités de Waanda Stoudio, qui n’a pas fini de nous faire rêver…Grand!